
Le vingtième congrès Convergences Hôpital Santé s’est ouvert à Saint-Malo dans une ambiance particulière : anniversaire d’une manifestation devenue incontournable, mais aussi contexte politique instable, marqué par l’incertitude sur l’identité du prochain ministre de la Santé.
Dès l’ouverture, deux voix fortes se sont exprimées pour les pharmaciens hospitaliers :
- Nicolas Coste, président du SNPHPU,
- puis Damien Peyronnet, président du SNRPH (Syndicat National des Radiopharmaciens).
Tous deux ont rappelé avec force les enjeux cruciaux pour l’avenir de la profession et du système de santé.
Le DES, une exigence au cœur de la sécurité des soins
Dans son allocution, Nicolas Coste (SNPHPU) a centré son propos sur un point clé : le Diplôme d’Études Spécialisées (DES) de pharmacie hospitalière.
Depuis le 1er juin 2025, l’exercice en pharmacie à usage intérieur (PUI) est conditionné à l’obtention de ce diplôme. Cette obligation, confirmée par une décision récente du Conseil d’État, marque la fin d’une longue période de dérogations.
Pour le président du SNPHPU, ce rappel est fondamental :
- le DES n’est pas une contrainte administrative mais une garantie de compétence ;
- il constitue le socle de légitimité professionnelle des pharmaciens hospitaliers ;
- il est la condition de la sécurité des patients, en particulier dans les structures les plus sensibles comme les EHPAD.
À l’inverse, les tentatives de contournement ou d’assouplissement de cette règle seraient, selon lui, une régression dangereuse. Les patients âgés, polypathologiques et polymédiqués accueillis dans ces structures sont précisément ceux qui ont le plus besoin d’expertise pharmaceutique.
Propositions pour répondre aux tensions de terrain
Conscient des difficultés de recrutement en PUI, Nicolas Coste a défendu une approche constructive. Le SNPHPU propose plusieurs leviers :
- former davantage d’internes en pharmacie hospitalière,
- faciliter leurs stages en PUI, en renforçant leur autonomie,
- ouvrir l’accès à un second DES au cours de la carrière,
- réformer le 3ᵉ cycle afin de mieux préparer les pharmaciens aux réalités du terrain.
Ces propositions visent à concilier exigence de compétence et réponse aux tensions démographiques.
Radiopharmacie : une expertise stratégique à défendre
Le second discours, prononcé par Damien Peyronnet (SNRPH), a mis en lumière un secteur particulièrement sensible : la radiopharmacie.
Il a rappelé que l’arrêté de 2015 reconnaissant la qualification spécifique des radiopharmaciens a constitué une avancée majeure. Cette reconnaissance officielle de leur rôle exclusif dans la gestion des médicaments radiopharmaceutiques a renforcé la sécurité dans les services de médecine nucléaire.
Mais des menaces existent. Certains projets envisagent de supprimer l’obligation de présence de radiopharmaciens dans certains centres libéraux. Pour le SNRPH, ce serait une régression majeure qui mettrait en danger la qualité des soins.
Un chiffre a marqué les esprits : 70 % des jeunes radiopharmaciens diplômés souhaitent exercer, au moins en partie, dans ces centres libéraux. Ce constat traduit un potentiel de développement, mais suppose des conditions adaptées (temps de présence, rémunération juste, reconnaissance statutaire).
Instabilité politique : un frein aux projets de long terme
Au-delà des débats techniques, Nicolas Coste a souligné un obstacle plus global : l’instabilité politique chronique. Depuis 2017, huit ministres de la Santé se sont succédé, sans compter les ministres délégués et secrétaires d’État.
Cette valse des interlocuteurs fragilise la capacité à :
- anticiper les besoins,
- construire des projets de long terme,
- assurer la continuité des réformes.
Dans un contexte marqué par les pénuries de médicaments, les tensions hospitalières et les attentes en matière d’innovation, cette instabilité est vécue comme un frein majeur par les pharmaciens hospitaliers.
Une profession mobilisée et tournée vers l’avenir
En cette Journée mondiale des pharmaciens, les syndicats ont tenu à rappeler l’engagement constant de la profession, en France comme en Europe.
Les pharmaciens hospitaliers se mobilisent pour :
- garantir la sécurité des patients,
- former les générations futures,
- défendre une expertise unique,
- accompagner les évolutions technologiques et organisationnelles de l’hôpital.
Leurs prises de parole à Saint-Malo traduisent une double exigence : défendre la valeur du diplôme et de la spécialisation, tout en proposant des solutions pour assurer la pérennité des équipes.
Conclusion
Les interventions de Nicolas Coste (SNPHPU) et Damien Peyronnet (SNRPH) l’ont montré : les pharmaciens hospitaliers ne défendent pas seulement une corporation, mais une exigence qui touche directement à la sécurité et à la qualité des soins.
À l’heure où l’hôpital affronte des défis démographiques, organisationnels et politiques majeurs, leur voix mérite d’être entendue.